Les Routes du Bien-Être - Genèse 04

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“L’impossible est le plus souvent quelque chose qui n’a pas été essayé”

Maud Ankaoua, Respire

Mon frère, comme nous l’avions si bien appris au catéchisme, disait que, comme saint Thomas, il ne croyait que ce qu’il voyait. Un formateur me dit : avez-vous vu saint Thomas pour y croire ?

              Alors cette formulation ancrée en moi, je la change et je la répète souvent ; je vois ce que je crois. Et qu’est-ce que je choisis de croire ?

              Je reviens sur la maladie de Charcot du grand-père paternel de mes enfants que nous ne vivions pas au quotidien. Leurs grands-parents habitaient à 1000 km de là et seul leur père y allait régulièrement à cette période. Mon dernier souvenir de cet homme que j’ai rencontré dans la cinquantaine - l’âge que j’ai maintenant – est celui d’un homme diminué dans un fauteuil roulant, quasi muet, étant atteint d’une paralysie de la gorge et donc avec des difficultés d’élocution. Mais jusqu’au bout, à l’hôpital, il refusait des visites, refusant toujours qu’on le voit encore plus diminué même si ses petits enfants le souhaitaient. Ainsi, mon dernier se l’est vu interdire et son envie de voir son grand-père une dernière fois, ça a été sur son lit de mort, comme on dit. Où se loge la vanité ? (ou une certaine forme de souffrance ? )

              Cet homme, 3 ans avant, encore plein d’allant, dirigeait son monde d’une main de fer et monopolisait souvent l’attention par sa vivacité, son dynamisme et ses dons du bricolage et de la minutie.

              Moi, inconsciente, m’enfonçant dans un état dépressif – je le sais aujourd’hui – mais ne l’ayant nommé que cette année-là de sa mort justement, ne pensant – presque – qu’à mes enfants, à leur père et à leur avenir avec une telle hérédité.

Cela m’empêchait de voir et de comprendre l’histoire de ma propre vie avec la mort de mon père deux ans avant et la mort de ma mère à 51 ans comme l’âge que j’allais avoir. Cette année est donc riche en évènements autant joyeux que cataclysmiques ! Fêter les 30 ans de mariage d’amis, aller à un festival avec un de mes films, la mort et l’enterrement de mon beau-père, niveau ascenseur émotionnel comme on dit, j’ai été servie et le pompon avec la séparation et la demande en divorce du père de mes enfants.

Pour entrer dans un détail intime surprenant, à la mort de mon beau-père, j’ai eu mes règles que je n’avais pas eu depuis deux ans, à la mort de mon père justement. Ce fut la dernière fois. Je sais qu’il y a une symbolique derrière ça mais je ne sais pas de quoi, juste une manifestation de mon corps. Et la fin de vie de ces deux hommes a été l’absence de parole – Charcot pour l’un et cancer de la gorge pour l’autre – De belles théories et des conclusions pourraient en être tirées mais je n’en cherche pas.

Quoi qu’il en soit, la mort de mon beau-père m’a permis de vivre ensemble avec mes frères des obsèques que nous n’avions pas fait 2 ans avant. Là oui, j’ai pleuré mais pas encore assez peut-être. Le tsunami arrive ensuite avec la séparation. Visiblement notre couple ne fonctionne plus et ces décès n’y sont pas pour rien. Mais je ne prends encore pas mes responsabilités ou bien je les prends toutes comme une culpabilité. Bref, c’est le bordel, la confusion totale.

J’ai souhaité aller voir ensemble M. la psychologue qui nous avait aidés deux ans auparavant avec notre deuxième enfant. Visiblement, seule moi devait avoir un problème mais les discussions, au lieu de m’aider maintenant, devenaient accusatrices. Mon cerveau était prêt à exploser et je me suis sentie littéralement en danger. Je comprends ce qu’est cette violence psychologique qu’on peut infliger à l’autre ou s’infliger et qui est invisible. Qu’elle soit volontaire ou pas, elle résulte d’une méconnaissance de soi-même. C’est aujourd’hui ma conclusion.

Bref, dans ce moment-là de rupture et d’écroulement de tout ce que je connais, je ne sais que dire oui comme si toute volonté propre n’arrivait pas à se manifester, aussi je me retrouve dans une position d’attente. Je sens que la solution est chez M. la psy mais je vois notre couple comme une entité et je suis incapable de décider seule. Je sais aujourd’hui que ma peur me figeait. Petite parenthèse pour dire que la peur peut figer – ce qui fait que certaines personnes ne comprennent pas l’attitude des victimes qui ne font rien – comme elle peut faire fuir ou attaquer.

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