Le Cas particulier des auteurs (et des autrices)

Comme les scénaristes, ce n’est pas le fait d’être un homme ou une femme qui fait la rémunération d’un auteur, c’est la cote.

Est-ce vraiment le cas ?

C’est peut-être plus facile pour les « nouveaux » métiers comme le scénario où les femmes ont été d’emblée plus présentes.

Alors que l’histoire de la littérature et des arts a « oublié » certaines femmes, hormis quelques (très) rares exceptions comme George Sand en France (peut-être sa liaison avec Chopin a-t-elle jouée ?) ou les sœurs Brontë en Angleterre, il est peut-être temps de faire un « véritable » état des lieux.

Les manuels scolaires, jusqu’à il y a peu, n’offraient quasiment que des textes d’hommes, français de surcroît, morts bien souvent.

Comment, dans ce cas, s’identifier à un romancier ? (surtout si je suis UNE romancière ?)

Un des premiers auteurs vivants de ma génération à faire parler de lui était Alexandre Jardin. Était-ce dû à son ascendance dont j’ignorais tout ?

Quoi qu’il en soit, enfin quelqu’un de mon âge (encore un homme, je sais, le formatage avait fait son œuvre !) qui accède à la notoriété et qui plus est, récidive, m’encourage à écrire, à démarcher les éditeurs, à décrocher un rendez-vous et à choisir… de renoncer. (écouter mon podcast sur l’autoédition pour en savoir plus)

Amélie Nothomb, de la même génération, arrivera plus tard qu’Alexandre Jardin et j’aurai déjà remisé mes rêves. De plus, quand je me souviens des quolibets qu’Amélie Nothomb a subi – surtout à son propos, rarement sur ses livres – j’ai suivi la vindicte générale, en bon petit soldat qui dénigre la femme artiste et j’ai abdiqué.

Aujourd’hui encore, je me rends compte que, femme ou homme, un auteur, une autrice n’accède à des revenus décents qu’avec difficulté, sauf s’il se fait un nom rapidement et encore – à vérifier –

Aussi je continue à refuser de payer par avance pour des ventes hypothétiques de mes livres. Ou tout du moins, je choisis ce que je veux payer.

Aujourd’hui, mes livres sont sur la plateforme Amazon qui propose un service aux auteurs indépendants : imprimer et expédier à la demande.

Dernièrement, je lisais que l’exception française - franchement parfois ce chant du coq patriotique me gonfle – faisait que les auteurs indépendants étaient beaucoup moins lus que dans les pays anglo-saxons.

De quoi est-ce que cela peut venir ? Les lecteurs ? Les auteurs ? Les maisons d’édition ? L’histoire de France (remaniée) ?

En tant qu’indépendante, je me heurte souvent à des réponses négatives de libraires, dépôts de presse, bibliothèques qui ont leur circuit d’achat et n’en veulent pas changer.

Je pose donc ici une question : est-ce favoriser l’ouverture et l’émergence de nouvelles approches littéraires que d’agir ainsi ? Il est évident qu’une élite est décideuse de l’acceptation d’un manuscrit dans une maison d’édition.

D’aucuns rétorqueront que les maisons d’édition (encensées publiquement par leur propres auteurs) sont là pour ça – encore une exception française qui est le seul pays à avoir très peu d’agents d’auteurs ! –

À cela, je demande encore : qui diffuse ce genre d’information sinon ceux (les éditeurs) qui ont un intérêt flagrant dans la vente de livres par milliers (vu qu’ils sont imprimés en énormes quantité et qu’il y a intérêt à les vendre pour amortir le coût).

Je laisse pour une autre fois le sujet du pilonnage des livres qui existe mais dont on ne parle pas.

Il est vrai et je l’ai constaté autour de moi, un auteur homme n’a pas forcément plus de revenus qu’une autrice femme.

Et pour moi, c’est encore plus scandaleux.

J’en suis tellement désolée alors que l’auteur ou l’autrice est bien celui ou celle qui produit la matière première.

Et dans notre monde, les matières premières des pays sont l’objet de guerre : pétrole, or, argent, minerais…

Je vais peut-être choquer certains en disant qu’Hitler avait compris la valeur des livres quand il les a fait brûler. Indéniable et pourtant, nous continuons, nous aussi, à les sacrifier, à nous sacrifier.

Pourtant aujourd’hui, le fait que les maisons d’édition françaises soient encore le paradis rêvé des auteurs me sidère.

Certains diront que c’est parce que je suis une autrice indépendante.

Oui et… Non.

Et pourtant, je connais des auteurs, des autrices dans des maison d’édition, qui ont pignon sur rue, auteurs primés même et pourtant leurs revenus ne leur permettent pas de payer leurs factures, ou alors avec une rémunération digne du salaire minimum et ont donc un autre boulot.

Pour moi, qu’ils aient un boulot différent de l’écriture ne me pose pas de problème comme c’est le cas par exemple, de Baptiste Beaulieu, non, le truc, c’est que certains n’ont pas envie de choisir.

Ils, elles veulent écrire, écrire comme ils respirent mais l’argent ne rentre pas suffisamment pour qu’ils puissent respirer sereinement.

J’ai la théorie (fumeuse peut-être) que nous avons cet héritage du 19e siècle où l’écrivain romantique doit souffrir, exhaler son mal-être pour produire ses écrits.

Foutaises !

J’écris aussi bien lorsque je me sens mal que lorsque je me sens bien.

Mes écrits sont juste différents et surtout, surtout, m’atteler à mon roman alors que des tracas d’argent me turlupinent et occupent mon cerveau, c’est plus difficile.

Écrire une centaine de pages, voire 200, voire plus, me demande une certaine concentration et assiduité, sinon, je perds le fil.

Et écrire pour la gloire (même posthume), très peu pour moi.

Aussi je suis heureuse de lire que Camille de Castelnau (scénariste sur la série le Bureau des Légendes, entre autres) confirme que le sexe importe peu dans son métier, c’est la cote qui compte.

Et c’est ça qui devrait être partout, la valeur de la personne, éditée ou pas, chez Gallimard ou pas, connue ou pas. Mais bon, peut-être que ce critère est encore sélectif…

Le système parfait n’existe pas, aussi acceptons de vivre l’imperfection !

Bises,

à la prochaine !

Dominique Chailan, Autrice, Réalisatrice, Raconteuse d’histoires

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